La Gastronomie : du sens aux sens
Revue de la Bibliothèque nationale de France N°49
Sous la direction d’Alina Cantau et Dominique Wibault
Longtemps considérée comme un sujet d’étude mineur, la gastronomie a maintenant acquis ses lettres de noblesse. En 2010, l’Unesco inscrivait le repas gastronomique des Français sur la liste représentative du patrimoine culturel immatériel mondial, l’élevant au rang de véritable pratique sociale et lui offrant une reconnaissance internationale. Notre dossier « La gastronomie : du sens aux sens » invite à considérer cet art de vivre à la française comme un marqueur identitaire fort et fédérateur, porteur de sens pour la société et dans la vie de chacun. Priscilla Ferguson propose un regard sur l’identité gastronomique française et sur la construction d’une idéologie gastronomique façonnée par un discours porté par un ensemble de textes (livres de cuisine, romans ou récits). Or, au sein de la communauté, chacun peut affirmer son propre « moi gastronomique » et ainsi transformer la gourmandise en connaissance, pratiquer l’art de manger avec intelligence, pour reprendre les propos de Mary Frances K. Fisher, évoqués par Denis Saillard dans l'article qu'il lui consacre.
Pour que ce patrimoine puisse rester vivant, la transmission doit en être assurée. Parmi les divers types de médiation possibles nous en avons retenu deux : les livres de cuisine pour enfants, véritables outils de transmission de valeurs et d’éveil aux sens, évoqués par Françoise Hache-Bissette et, pour être dans l’air du temps, les blogs culinaires, illustration de nouvelles pratiques, qui ont fait l’objet d’une enquête statistique menée par Sidonie Naulin. Il ne faut néanmoins pas oublier que la gastronomie est avant tout une expérience sensorielle multiple, sollicitant non seulement le goût, mais aussi l’odorat, l’ouïe, le toucher et la vue, activement mobilisés lors du repas et source de véritables émotions gustatives.
On ne peut envisager le plaisir gastronomique sans rendre justice à toute la vie des sens, la célébration du vivant, comme le suggère Ingrid Astier. Avec des jeux de mots épicés et des images savamment « cuisinées », elle nous invite à observer le miracle quotidien du rituel de la table, fenêtre ouverte sur le « paradis terrestre ». Par un jeu de correspondances, il est même possible de rapprocher discours gastronomique et critique musicologique, observe Didier Francfort, le goût et l’ouïe faisant appel au même paradigme hédoniste. Enfin, cette polysémie conviviale a trouvé en Paris un lieu d’expression privilégié. C’est à Paris qu’est née la gastronomie ; c’est à Paris que se sont ouverts les premiers restaurants, devenus très rapidement de nouveaux lieux de sociabilité où l’on faisait bonne chère, et dont la renommée allait très vite attirer le monde entier. Enfin, en lien avec le succès des restaurants, c’est à Paris qu’est née une nouvelle forme de journalisme : le journalisme gastronomique.
Informations pratiques
Broché, 96 pages, 20 × 27 cm
9782717726459
- Bibliothèque nationale de France