Certains êtres apparaissent voués à la poésie au point de ne subsister que par elle. Tel fut, mieux que personne, Oscar Vladislas de Lubicz-Milosz. Lancé dès l'adolescence dans la mêlée symboliste il fut, toute sa vie un poète, même quand il abordait le théâtre ou le roman. Il n'est pas jusqu'à sa pensée philosophique qui n'ait l'ardeur propre au lyrisme, jusque dans les moments où le touche le génie de l'abstraction. Chez lui, la démarche logique n'est qu'un moment entre l'image originelle et le grand développement symbolique où s'équilibrent toutes les formes de la pensée.

S'il n'est qu'un grand thème dans sa poésie, son art, lui, se développe avec la liberté et l'ampleur d'un grand rythme : le poème chante la nostalgie de l'enfance et le charme un peu maladif de tout ce qui porte les stigmates du passé. Il semblerait même que, chez ce poète prédestiné au souvenir, une seule chose demande à être proférée. Inlassablement la même phrase enroule ses volutes dolentes ou fiévreuses à la recherche du point le plus aigu d'une souffrance ressemblant étrangement à une volupté. Le poète secoue très jeune les normes communes de la prosodie. Ce qu'il cherche, c'est une pulsation proche du cœur et du souffle, et qui s'adapte à tous les sursauts de l'émotion.
 
Cet ouvrage a été publié à l’occasion de l’exposition « Oscar Venceslas de Lubicz-Milosz (1877-1939). Ténèbres et lumière », organisée par la Bibliothèque Nationale à l'occasion du centenaire de sa naissance et présentée dans le Salon d'honneur du site Richelieu, du 26 mai au 26 juin 1977.