Mozart en France
François Lesure
Préface de Julien Cain
Le présent ouvrage s’attache d'une manière vivante aux deux périodes qui virent Mozart séjourner à Paris, et c'est ainsi que l'on peut évoquer tour à tour l'enfant prodige de sept et dix ans des années 1763 et 1766 qui découvre l'opéra-comique français, et l'homme de vingt-deux ans de l'année 1778 qui, déjà célèbre mais venu à la recherche d'un emploi, se heurte à des préjugés, à des résistances qu'il n'avait pas prévus, trouve devant lui des situations acquises et, découragé, décide de retourner à Salzbourg.
On a parlé de sonates et de symphonies « parisiennes ». Paris eut-il sur le compositeur, qui accepta d'écrire pour le Concert Spirituel une importante symphonie, une influence que l'on puisse reconnaître ? Il convient de ne pas s'en tenir aux propos tenus par Mozart sur le goût musical des Français et sur la France elle-même : ses jugements sur ses compatriotes ne furent pas moins sévères. La vivacité de ses réactions contre tout ce qui pouvait le contrarier dans son travail créateur est traduite dans ses lettres, les plus franches qu'un musicien ait jamais écrites, avec souvent une brutalité qui surprend ceux qui ont voulu faire de lui un personnage en quelque sorte divin. On l'a dit justement : Mozart est un homme du XVIIIe siècle et non un précurseur du XIXe. C'est bien pourquoi, quoi qu'il ait pu écrire, il se rencontre avec ce que l'esprit français propose alors à l'Europe de plus éclatant.
Sa vraie place est du côté de Voltaire. Quel rapport entre leurs esprits ! Voltaire, lui aussi, est un homme du XVIIIe siècle et de tous les temps ; chez lui aussi, le même regard froid et impitoyable, la même ironie, la même férocité dans la satire, la même profondeur dans le fatalisme. Vivant en plein mouvement du Sturm und Drang, enveloppé dans cette vague de sensiblerie qui tend à submerger toutes les formes de l'art, Mozart compose les grandes œuvres dramatiques dont les sujets protestent contre ces nouvelles tendances. Et il est bien significatif que deux ans après la représentation du Mariage de Figaro, de Beaumarchais, Mozart fasse représenter à Vienne, en 1786, puis à Prague, sur le livret que lui apporte Da Ponte, une Commedia per musica qui est vraiment la « transfiguration » d'un chef-d’œuvre français.
Cet ouvrage a été publié à l’occasion de l’exposition « Mozart en France », organisée par la Bibliothèque nationale de France à l'occasion du 2e centenaire de sa naissance et présentée sur le site Richelieu, Galerie Mazarine, du 12 octobre au 31 décembre 1956.
Informations pratiques
Broché, 102 p., 21 x 15 cm
9782717700992
- Bibliothèque nationale de France